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L’amant-double : double-je

L’amant-double : double-je

Des personnages, moitié moins d’acteurs. Dès sa racine, le nouveau film de François Ozon nous lâche seul dans le labyrinthe, sans plan, ni boussole. Chacun est l’Autre d’un autre, sans savoir qui est le premier.

Chloé est jeune, séduisante et ressemble tant à une star qu’à un fantôme. Elle va mal, son mal est physique mais ses maux indescriptibles.

C’est lorsqu’elle se décide à consulter un psychiatre qui lui a été conseillé que le film commence. Elle parle, il reste muet, jusqu’au jour où il doit mettre fin aux séances, car il est tombé amoureux d’elle. Amoureux après des heures et des heures à l’écouter raconter sa vie jusqu’aux détails les plus infimes.

L’amant-double est froid. Tout est gris, l’image est terne, autant dans la cabinet de Louis qu’au milieu des espaces immaculés du Palais de Tokyo. C’est froid également dans les regards, ces yeux qui en disent tant mais que l’on n’arrive pas à interpréter. Pourtant cette froideur fascine autant qu’elle attire. On aimerait saisir au moins un personnage pour pouvoir s’accrocher à lui, mais lorsqu’on a l’impression d’être enfin à la hauteur, la narration sème à nouveau le trouble.

Il est question de secrets, d’histoires que l’on tente de dissimuler, d’amour complexe, de sexualité aventurières et très rarement filmée de la sorte au cinéma.

Des plans plutôt fixes, plutôt lents, des chairs là où l’on devrait voir de la peau, des visages que l’on oublie pour se concentrer sur le reste. C’est un sujet assez central dans le film et cela en donne une vision assez intéressante. Ces doubles personnalités que nous avons tous en nous. Lorsque l’on veut tout mais sans les conséquences. Lorsque ces dernières nous terrifient mais que l’on y va quand même, éperdument.

Mais les conséquences nous rattrapent toujours, personne ne passe outre. Marine Vacth et Jérémie Renier forment un trio attirant, dangereux et peut être même brutal. Leur histoire se niche dans les détails et c’est ce que j’aime le plus dans ce film. D’une broche animale piquée à un pull, un numéro masqué, une voix confondue, un visage non reconnu, c’est au spectateur de tirer ses propres conclusions car personne ne l’aidera.

La fin est très confuse, peut être un peu trop, mais c’est finalement ce qui permet d’y penser après le générique.

Sommes-nous vraiment toujours deux ? Est-il vraiment en ce moment quelqu’un d’unique ?

L’amant-double, comme une longue enquête non désirée est bien rythmé et je retiens ses superbes personnages parfaitement interprétés. Marine Vacth peut certes présenter un jeu un peu théâtral comme je l’ai beaucoup lu de manière négative sur ce film, mais je crois que j’emploierais un autre adjectif : hypnotisant. Je ne sais si c’est sa voix, son ton lancinant ou sa beauté magnétique non symétrique. Je ne sais pas.

Sur une ritournelle si chère aux films de François Ozon, L’amant-double pose mille questions et nous offre une sale histoire à vivre, mais une belle histoire à regarder, parce qu’au cinéma ce n’est pas nous sur l’écran.

 

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