
Tár : vue du sommet
Voilà plusieurs semaines que j’ai vu Tár. Je n’arrive toujours pas à déterminer si le film m’a charmée ou au contraire, si je suis passée à côté. Une chose est certaine, il m’a marquée.
Cate Blanchett y tient le grand rôle d’une cheffe d’orchestre mondialement connue. Comme toute personne de pouvoir qui se respecte, elle est peu aimable, inaccessible et en proie. On sent dans son regard et dans sa façon de se mouvoir toute la soif qu’elle peut éprouver face à de la chair fraîche. C’est une vision si ce n’est amusante, plutôt intéressante tant elle est attribuée aux hommes habituellement.
C’est probablement le premier point que j’ai trouvé creux dans le film. Ne peut-on pas faire d’une femme un mauvais personnage sans qu’il soit calquer sur la médiocrité d’un mauvais homme ?
L’ambiance est froide, les couleurs sont glaciales. Que ce soit dans les appartements, dans la voiture ou au milieu de l’orchestre, tout respire la tristesse et l’angoisse, même les personnages qui semblent plus heureux ne font pas la balance. Le film est sombre et nous entraîne dans sa chute.
Lorsque je suis allée voir le film, je n’avais rien lu. Je ne savais même pas s’il s’agissait d’un biopic, d’une histoire presque vraie… À mesure que l’histoire se déroulait j’avais la sensation que cette cheffe d’orchestre, réelle ou non, n’était que la métaphore de celles et ceux qui officient à la tête des plus grands orchestres du monde. L’art vaut-il la terreur ? Jusqu’où un humain peut-il tomber dans la spirale du pouvoir ? Peut-on cesser le tourbillon d’une descente aux enfers ? La scène où Tar donne un cours à des étudiants est malaisante. J’ai eu la sensation que tous les réactionnaires de plus de 50 ans s’étaient regroupés dans une salle de conférence pour écrire cette scène. Vide de sens, sans argument et d’une vulgaire tristesse. Enfoncer des portes ouvertes lorsqu’on est supposés porter la singularité d’un artiste : c’est dommage.
La fin du film (qui arrive très tard), est assez énigmatique, tout peut s’imaginer. Un point d’étape ? L’unique solution ?
Plusieurs jours après la fin du film, je retiens la photo absolument superbe. Les plans sont d’une grande finesse et on sent qu’ils ont été longuement pensés, travaillés, essayés, réajustés. Un travail de fond aussi précis qu’une partition. Le visage de Cate Blanchett me reste en tête, autant que ses gestes secs et légers à la fois, son interprétation est aussi magistrale que la musique qu’elle fait raisonner.
Comme souvent, je me demande si la forme d’un film peut rattraper un fond que j’estime un peu trop fainéant. L’art et l’intelligence sont-ils forcément à apprendre de quelqu’un qui roule en Porsche, n’approche pas le monde et se maîtrise au point de ne plus avoir de sentiments