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BlacKKKlansmann : what goes around comes around

BlacKKKlansmann : what goes around comes around

Qu’adviendra-t-il des films à messages ? De ceux qui dénoncent et mettent en lumière les heures les plus sombres de l’histoire ? À quel moment ces histoires et ces messages nous paraitront aussi lointains qu’irréels ? Quand ?

Le nouveau film de Spike Lee divise : les fans absolus de ce film de plus de deux heures qui montre comment un policier noir du Colorado infiltre le Ku Klux Klan puis de l’autre les réfractaires : ceux qui pensent que c’est trop vu, mal fait, mauvais angle.

Le scénario est simple mais bien senti, sur deux heures nous suivons l’infiltration de Ron, interprété par John David Washington. Il est jeune et noir. Il vient d’arriver au poste de police, il est renvoyé aux archives et quelques-uns de ses collègues racistes se jouent de lui. Rapidement on lui demande d’infiltrer le mouvement des Black Panther : classique. Mais Ron est malin et il veut changer les choses, c’est en s’immisçant dans le Ku Klux Klan qu’il va devenir respecté et un enquêteur hors norme. Son acolyte, joué par le merveilleux Adam Driver (meilleur acteur de sa génération et de très très loin.) va lui permettre d’aller encore plus loin dans son enquête.

Étonnement j’ai beaucoup ri, car le film est tourné en ce sens, il y a des moments où la bêtise de certains est tellement flagrante qu’on ne peut pas faire autrement. Par ailleurs, certaines scènes sont marquantes. Outre la fin du film qui se déroule très rapidement, les scènes de rendez-vous du KKK chez Félix sont brutales. Félix a intégré le mouvement il y a longtemps, lui et sa femme n’ont qu’un rêve : tuer du nègre. Dans son sous-sol, il y a une batterie d’armes dont il est fier. La scène du détecteur de mensonge est incroyable, le jeu d’Adam Driver au sommet.

Il y a probablement d’autres choses qui sont moins bonnes dans ce film ou peut-être pas à la hauteur du sujet mais le générique de fin m’a totalement happée. J’étais si concentrée sur le film et sur cette fin plus ou moins ouverte que reprendre la réalité en pleine face était douloureux. Souvent au cinéma, ce qui me plait c’est le moment d’après. Lorsque le générique arrive à la toute fin, ces quelques secondes entre l’écran noir et les lumières qui se rallument. Je me lève, prends mes affaires puis je sors. J’aime bien ce moment dans l’entre-deux : entre le film et le retour à la vie quotidienne. Avec BlacKKKlansman je n’ai pas eu ce temps-mort, j’ai pris une gifle qui me disait que ce film n’en était pas un. C’était une histoire vraie, c’était la réalité d’il y a quelques années et c’est une réalité qui revient.

Je n’avais plus du tout envie de rire alors que l’amateurisme de Ron me faisait sourire depuis 2 heures. C’est dans les larmes que j’ai quitté la salle. Pas à cause du film, mais à cause du message, j’ai pleuré ce monde qui est derrière la porte. Ce film présente une expérience, cela va au-delà de la narration et du divertissement, c’est une douleur.

J’ai bien conscience que pour beaucoup de gens le cinéma doit être synonyme de plaisir, ce film en était un, c’est simplement la fin qui m’a secouée, mais je crois qu’il est parfois nécessaire de remettre les yeux de tous sur ce qui se passe dehors. Peut-être qu’à trop vouloir minimiser ou fermer les yeux on oublie que c’est nous. C’est nous qui laissons l’histoire se reproduire éternellement. Si tous les gens qui n’étaient pas d’accord avec les extrêmes se soulevaient, leur nombre paraitrait ridicule. Si on arrêtait d’être trop clément avec ceux qui font le mal, on ne laisserait pas des hommes en chapeau pointu blanc brûler des vies, hurler leur haine et répandre le sang.

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