cinéma
Barbara : obsédante et maladroite

Barbara : obsédante et maladroite

La maladresse, c’est souvent mal vu. Comme quelque chose de mal exécuté, quelque chose qui serait passé à côté.

J’ai tendance à penser que la maladresse, c’est l’expression des sentiments. De quelque chose de trop fort pour qu’on réussisse à trouver les mots, mais c’est une preuve. D’amour souvent.

Jeanne Balibar incarnant l’immense Barbara, pouvait-on rêver mieux ?

La ressemblance physique est troublante, deux grandes dames brunes. Leurs voix se superposent, s’accordent, se répondent.

Barbara est un film dans le film, lui-même dans le film d’une vie ou plutôt de vies. Peut être que c’est cet aspect qui pourrait perdre le spectateur, mais si on se laisse porter par le film, je crois qu’on aime être troublé et perdu.

Si le film comporte nombreux personnages secondaires, il n’a d’yeux que pour BaliBarbara… Et pourtant ce n’est pas un biopic au sens classique du terme.

La chronologie est brève, on ne balaye pas les années d’une enfance compliquée à une mort prématurée. Ici c’est quelques bribes, des détails, des récits rapportés, des faits romancés.

Ce sont des trajets en voiture filmés comme les road trip de toute une vie. Des après-midis de répétitions, lunettes noires et cigarettes. Puis un film tourné dans un appartement Parisien reconstitué, c’est mélangé mais jamais brouillon.

Mathieu Amalric, qui signe ce film, s’est donné le plus beau rôle de mise en abyme. Celui du réalisateur, de l’artiste créatif, du chercheur en quête de beauté. Il est lui et tous ceux qui l’incarnent à la fois.

J’ai trouvé ce film d’une technique irréprochable. Au bout de plusieurs minutes, de plusieurs séquences, les techniciens naissent du décor et on ne sait alors plus où la scène doit se situer. Tant de fluidité dans les mouvements, c’est impressionnant. L’image danse et chante, elle est très sombre, nuitée, à l’image de ses héroïnes. Je crois que c’est le travail du son qui m’a le plus fascinée. Le changement de grains, les variations, les voix que l’on mélange, c’est ce qui m’a émue dans ce film. La beauté de la reconstitution des voix.

On dit que lorsque les gens meurent, la voix est la première chose que l’on oublie. C’est vrai et c’est rageant à la fois. Qu’y a t’il de plus beau que se souvenir d’une voix qui nous parle, qui nous touche et peut être nous aime ?

Les yeux bleus ça se partage, les cheveux blonds aussi, mais les voix jamais, c’est singulier. Celle de Barbara est unique-universelle et c’est ce qui la rend belle, celle de Jeanne Balibar est unique et intime, c’est ce qui la rend précieuse, comme ce film.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *