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Visages Villages : documentaire Nouvelle Vague

Visages Villages : documentaire Nouvelle Vague

Qui aurait pu penser qu’en s’appelant Agnès Varda et JR on avait besoin du financement participatif pour monter un film ?

Quand j’y réfléchis, je me pose des questions sur le financement du cinéma en France, puis au générique quand j’ai vu tous les noms -de plus de 500 contributeurs-, je me suis dis que c’était beau un film sur les gens, financé (pour une petite partie) par les gens.

J’ose même espérer que finalement quand on s’arrange entre nous sans regarder plus haut : on peut tout faire.

Visages Villages, c’est JR qui continue son projet de vie : Inside Out Project. Je me souviens que lorsque j’étais au lycée, on avait étudié ce que notre prof appelait « un travail socio-artistique ». Un travail basé sur les gens, pour les gens.

Pour ce film, c’est avec Agnès Varda qu’il partira sur les routes de France. Elle avec lui.

Agnès Varda c’est une figure, dans tous les sens du terme. Une figure de la Nouvelle Vague, l’une des seules réalisatrices… Et Cléo. C’est aussi son visage que l’on connaît tous, ses couleurs de cheveux qui nous ont tous fait rire au moins une fois, peut être la première.

C’est de cette rencontre que naissent toutes celles du film. C’est souvent plus pertinent à deux car les points de vue sont variés. On ne pose pas tous les mêmes questions, on n’est pas curieux des mêmes choses.

Agnès et JR s’en vont dans la France, parler à de réelles personnes de leur vie réelle. S’entremêlent la mélancolie, le souvenir de la difficulté, la joie parfois d’être en vie, même ici.

Le bonheur émouvant d’un homme qui ne sait s’il a le droit au maximum ou au minimum retraite car il n’a jamais travaillé dans les cadres, mais finalement il sourit de ses 5 dents restantes et peu lui importe, il est bien ici. Ici pour lui, c’est entre la lune et les étoiles, chez lui : sur la planète.

Ce qui m’a le plus marquée dans ce film, c’est sa poésie, son verbe. Certaines phrases sont déclamées, mais d’autres viennent de la gorge, ça se sent et s’entend distinctement.

Dans les documentaires, c’est souvent ce qui m’émeut le plus : quand on laisse les gens se livrer. Ça m’émeut car je sais le courage et l’effort que cela demande de poser des mots sur ce qu’on a dans la tête et sur le cœur. Et la double dose de dignité que cela demande d’exprimer tout ça face à quelqu’un.

C’est probablement pour cela que le documentaire est un genre si fascinant, ça serait comme du cinéma qu’on n’aurait pas inventé.

Ce qui est formidable, c’est que dans Visages Villages, on voit sans cesse Agnès et JR, ils en savent beaucoup sur les autres, on ne sait rien sur eux. Jusqu’au moment où on entre dans son intimité à lui, de manière tendre et pudique puis dans la vie d’Agnès Varda de manière brutale et violente, à la fin du film. Ça crève le cœur de voir que l’amour jamais ne s’en va alors que ceux qu’on aime eux, partent.

Quand je repense à ce plan sur le visage d’Agnès qui repense à Jacques, quelle tristesse… J’ai retenu des tas d’autres choses de ce film, mais ce plan, ces yeux qui se mettent à pleurer, cette voix qui tremble et ce cerveau qui ne sait plus quels mots envoyer… C’est comme lorsqu’on découvre, quand on est enfant, que les grands aussi peuvent pleurer quand ils sont tristes, c’est déchirant.

Le regard sur la vie qu’apporte le film est merveilleux et nécessaire à la fois. On sillonne cette France qui si souvent va mal, mais qui n’oublie jamais de rire et de sécher ses larmes.

Cette grande heure permet de réaliser encore une fois, que l’on apprend à connaître l’Autre seulement dans sa singularité, dans ce qu’il est profondément. On n’apprend pas à se connaître au milieu des autres, quand tout le monde écoute.

La musique de –M- ne fait qu’augmenter la douceur de ce film. Sa mélancolie également. Ces yeux que l’on porte sur les passés qui se croisent, l’avenir que l’on peine à dessiner, les personnages derrière lesquels on se protège par crainte, peut-être, que le monde sache qui l’on est.

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